On les voit tous passer, ils font le buzz et soulèvent les passions… Puis on les oublie aussitôt. Les petites ou les grosses actualités, les clashs TV et autres polémiques sur les réseaux sociaux envahissent notre temps et polluent nos esprits. Bref, ils sont beaucoup plus nocifs qu’on ne le pense généralement. Vous croyez que j’exagère ? Peut-être… à moins que ?…
Après avoir été saturé d’informations au point de trouver cela désagréable, j’ai décidé d’y aller mollo avec ma consommation de médias. Je vais vous expliquer pourquoi et comment j’ai réalisé cette « désintoxication médiatique ».
Les actualités nous sont-elles utiles ?
Avant d’aller plus loin, résumons la situation de tout un chacun. Nous menons notre petite vie, travaillons, rencontrons si tout va bien l’amour et l’amitié, fondons une famille peut-être… Puis quelques voyages, quelques loisirs, quelques soucis… Voilà en quoi consiste une vie humaine en général… J’entends par là que nous ne sommes pas tous destinés à changer le monde.
Cependant, nous avons la capacité d’influer, de par nos actions individuelles, sur le destin commun. Et il est évident que notre faculté d’améliorer les choses est beaucoup plus grande si ce « destin commun » est celui d’une petite communauté (famille, quartier, village), que celui de notre nation – ou celui de l’espèce entière. Bien sûr, si une cause nous tient vraiment à cœur, il nous est possible de déplacer des montagnes – surtout si nous créons ou rejoignons un mouvement collectif qui rassemble des personnes ayant les mêmes buts que nous.
Tout cela, je ne vous l’apprend pas. Pourtant, nous faisons comme si il en allait tout autrement. On passe une bonne partie de notre temps à nous inquiéter des paroles prononcées par tel ou tel chef d’état ou célébrité, de tragédies concernant des gens que nous ne connaissons ni d’Eve ni d’Adam, d’actes accomplis par des personnes ou des groupes que nous ne croiserons probablement jamais. Bref, on se prend la tête sur tout un tas d’événements qui ne nous concernent pas directement et auxquels on ne peut rien changer.
Élargissement de notre horizon informatif
C’est un fait, la télévision et les réseaux sociaux augmentent considérablement la portée de nos sens. Avant l’invention des médias de masse, les connaissances et intérêts d’un individu se limitaient à sa communauté réelle, à son environnement plus ou moins direct, à tout ce sur quoi il pouvait avoir une emprise. Il ne pouvait pas savoir ce qui se passait en Chine au même moment, ni même ce que venait de dire le duc régnant sur la région voisine. Son « horizon informatif », donc, était beaucoup plus limité que le nôtre.
Cela présentait quelques désavantages, certainement – en termes de culture et d’ouverture d’esprit par exemple. Mais au quotidien, ce qu’il apprenait, pour l’essentiel, le concernait beaucoup plus directement.
Ce paysan de l’ancien régime, il ne risquait pas de se soucier d’un tremblement de terre en Asie – et en quoi était-ce plus mal ? Qu’aurait-il pu y faire ? Par contre, savoir que la maison du voisin brûlait, cela lui était parfaitement utile… Tout d’abord, il pouvait agir directement sur cette mauvaise nouvelle (en aidant son voisin à éteindre le feu). Mais aussi et surtout, il avait un intérêt direct à connaître cette information : d’une part, il connaissait personnellement son voisin et d’autre part, sa maison pouvait brûler s’il ne faisait rien.
De nos jours, ce filtre de la proximité géographique a pratiquement disparu. Conséquences : dans la masse d’informations qui nous parviennent, la plupart ne nous concernent pas réellement et/ou ne nous offrent aucune possibilité d’action.
Actualités et biais de négativité
Ajoutons à cela un aspect majeur, l’essentiel des actualités sont négatives ou alarmistes. C’est lié en bonne partie au biais de négativité. Nous prêtons naturellement attention aux problèmes et aux dangers supposés, car ils pourraient représenter une menace à terme.
Mais, si cette prédisposition a été très utile à notre espèce pour survivre au sein d’une nature sauvage et parfois hostile (mieux vaut s’inquiéter de l’hiver prochain et prendre des mesures pour avoir suffisamment à manger), elle est plutôt néfaste dans nos sociétés modernes, saturées d’informations tous azimuts. Car tout naturellement, ce sont les informations négatives qui sont les plus populaires et donc les plus relayées. Même si elles ne sont pas du tout pertinentes, car elles ne nous concernent en rien et que nous n’y pouvons rien changer.
Parce que c’est un fait : la peur fait vendre. Mais aussi la moquerie, l’indignation, le pathos exacerbé… Autant d’émotions négatives qui sont utilisées par les médias pour capter notre attention.
Stress et actualités
Cette saturation d’informations inutiles et négatives rend notre environnement beaucoup plus sombre qu’il ne l’est en réalité. Untel a dit ceci, c’est scandaleux, machin a menacé machine, tel et tel crime ont été commis… Des drames et des disputes, il s’en produit tous les jours de par le monde. Nous sommes plus de 7 milliards d’humains. Combien d’entre nous mourront aujourd’hui ? Combien auront des accidents, combien souffriront atrocement ?
Mais la réalité ne se limite pas à ça. Au risque de paraître fleur bleue, rappelons qu’il se passe quotidiennement plein de belles choses. Des gens se rencontrent et tombent amoureux. Des personnes survivent contre toute attente à une maladie incurable. D’autres vont écouter le plus beau concert de leur vie.
Et surtout, l’immense majorité des choses se passent en fait sans anicroche : la plupart des trains et des avions arrivent à l’heure, la plupart des gens passent une journée sans rencontrer de problème majeur, la plupart des êtres vivants sont en assez bonne santé pour profiter de la vie… Sauf que cela, les journaux, la télé et les réseaux sociaux ne nous en parlent pas beaucoup (parce que, sans doute, ça n’intéresse personne).
Le monde reflété par les actualités est donc noirci et démesuré. Du coup, il nous est impossible d’agir dessus. Il nous paraît foutu, invivable, désespéré. Et cela provoque ou accroît considérablement notre stress… De manière si subtile qu’on ne s’en rend pas toujours compte.
Clashs TV, polémiques stériles, débats politico-médiatiques…
Et cela va sans dire, la couche de commentaires, d’interprétations et de récupérations de tous ces faits si éloignés de nous n’arrange pas les choses. Faut-il vraiment se faire un avis sur tout ? Y a-t-il toujours quelque chose à dire ou à retenir des vêtements, du comportement ou des propos de telle célébrité ?
Le pire, dans le cirque médiatique et le tourbillon des actualités, ce sont ces buzz, clashs, débats et polémiques dans lesquels les égos s’affrontent à corps et à cris. Il faut happer le chaland, choquer la bourgeoise, créer des clivages. Et tout ça se base sur du vent, des paroles, des vannes plus ou moins agressives prononcées sur un plateau TV ou dans le studio d’une chaîne Youtube…
Le débat doit être constamment ravivé, les polémiques doivent se succéder sans interruption, car il faut remplir l’espace médiatique, maintenir l’attention du spectateur, vendre du temps de cerveau disponible, faire toujours plus de vues et de likes. Ce spectacle intégral, où tout est prétexte à commentaire et à débat, comporte évidemment une forte part addictive. On voit s’affronter les chefs de la tribu dans leur combat de coq. On apprécie les bons mots, les phrases choc nous émoustillent, les remarques inédites nous titillent… C’est comme un bon match de foot.
Et on en rajoute nous aussi, le lendemain avec les collègues ou en direct sur les réseaux sociaux, on participe, on donne notre avis, sur le fond et surtout sur la forme. Et encore, si les débats portaient loin, si les sujets étaient capitaux, si les vues étaient profondes, les échanges réfléchis, soigneusement argumentés, respectueux… Mais là, vraiment quelle perte de temps et d’énergie ! Quel abrutissement, quel abêtissement…
Filtrer les canaux d’actualités
Mais on peut agir. Ce n’est pas très compliqué en fait. Il suffit d’éteindre la télé, de couper internet. Pas tout le temps bien sûr. Mais limiter notre consommation d’informations à l’essentiel. Se concentrer avant tout sur nos proches et notre quartier, nos centres d’intérêt. Arrêter de regarder le JT en mangeant. Préférer parler avec sa famille. Fuir les chaînes d’info en continu – où on commente en boucle des événements tristes ou effrayants. Arrêter de suivre et de réagir aux nouvelles tendances médiatiques sur les réseaux sociaux…
Maintenant, quand je vois poindre un clash ou une polémique sur un média (social ou traditionnel), je m’efforce de ne pas lire ou visionner, de ne pas creuser, de ne pas répondre. Je sais d’avance que ce sera une perte de temps. Les sujets, même s’ils m’intéressent vaguement, seront mal traités et maltraités. Les intervenants ne rechercheront pas ensemble la vérité, mais plutôt chacun à avoir raison. Et les conditions du débat iront dans le sens du conflit, pas de l’échange serein.
Mais alors comment on s’y prend ? On coupe tout ? On ferme les écoutilles et on revient à la vie hyper-locale de l’ancien régime, avec son lot d’ignorance et d’inculture ? Faut-il obligatoirement se voiler la face pour vivre mieux ?
S’ouvrir au monde tel qu’il est
Non bien sûr. On ne va pas chercher à se couper de tout, mais à voir le monde comme il est et à se rapprocher de ce qui compte vraiment pour nous et de ce que l’on peut changer. Pour cela, je vous conseille de :
- Vous intéresser à votre entourage, à votre lieu de vie et laisser une place aux actualités locales (culturelles, notamment).
- Sortir, rencontrer des gens en chair et en os, discuter avec eux, les écouter.
- Restreindre, voire supprimer votre consommation quotidienne d’actualités. Si vous parlez avec les gens tous les jours, vous saurez vite quand quelque chose de vraiment important est en train de se passer. Et vous verrez que la plupart du temps, ce n’est pas le cas.
- Privilégier les documentaires approfondis d’au moins 30 minutes et les conférences aux reportages bâclés du JT et autres débats-spectacles.
- Lire. Et si possible, plutôt des livres, des essais. Éventuellement, un peu d’articles de fond dans la presse hebdo ou mensuelle.
- Être curieux de tout, ne surtout pas se limiter aux titres et aux genres ce que l’on connaît. Varier les auteurs, les avis, les bords. Éviter les plus racoleurs…
- Faire le tri entre les données brutes – les faits « nus » et les interprétations qui en sont faites. N’oubliez pas que c’est à vous de choisir le poids et le sens que vous donnez aux choses – ne vous laissez pas embarquer inconsciemment par les jugements et les idées des autres.
- Sur les réseaux sociaux, se désabonner des groupes et des comptes « toxiques » pour ne plus suivre en permanence les contenus négatifs ou polémiques.
L’action comme remède au stress et à la passivité
Enfin, si une cause vous tient à cœur, alors plutôt que d’assister passivement au flux d’informations qui se déverse et/ou de rester dans le simple débat d’idées avec les collègues et les copains, il faut agir – et si possible directement, localement et/ou collectivement. On retrouve l’impression d’avoir une emprise sur notre environnement et notre destin. C’est une autre façon, très efficace, de faire baisser le stress liés à notre perception du monde. Par contre, il n’est pas très utile d’y penser en permanence et de se gaver d’actualités sur le sujet…
Conclusion
Cet article est bien sûr le reflet de mon interprétation du monde et de notre rapport à l’information. Il s’agit d’un point de vue personnel et je n’entends l’imposer à personne (mais on peut tout à fait en discuter dans les commentaires, avec respect, écoute et bienveillance).
Pour autant, je ne prétends pas avoir la primeur de ces idées ! Je les ai glanées ça et là auprès de différents auteurs et intervenants à des conférences – des personnes aussi différentes que Frédéric Lenoir et Tim Ferriss…
Puis je me suis mis à pratiquer progressivement la désintoxication médiatique.
Ce n’est pas quelque chose que je fais en permanence de manière stricte, mais je peux vous assurer que suivre ces règles m’aide à voir le monde de manière moins sombre et à me sentir plus épanoui au quotidien. J’espère que ces quelques clés vous seront utiles à vous aussi !
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